FRANCE : Partir à la retraite sans âge légal ? La proposition inattendue de la CFDT

FRANCE : Partir à la retraite sans âge légal ? La proposition inattendue de la CFDT

Source : Planete.fr
Par Nina Parage,
le 13/06/2025

Supprimer l’âge légal de départ à la retraite : c’est ce que propose la CFDT, qui souhaite instaurer une retraite « à la carte », fondée uniquement sur les trimestres cotisés. Un projet qui interpelle, séduit, mais soulève aussi des questions.

Alors que la dernière réforme des retraites est encore dans toutes les têtes, avec le report à 64 ans qui a suscité colère et incompréhension, le débat reste vif sur la meilleure manière d’organiser le départ des Français vers une nouvelle vie. Faut-il continuer à reculer l’âge de départ ? Adapter les règles aux carrières longues ? Ou tout repenser ? C’est dans ce contexte brûlant que la CFDT relance une idée déjà évoquée, mais encore jamais mise en œuvre : supprimer purement et simplement l’âge légal de départ à la retraite.

Retraite sans âge légal : une proposition radicale
La CFDT (Confédération française démocratique du travail) est le premier syndicat en nombre d’adhérents dans le secteur privé. Connue pour ses positions réformistes, elle propose un système de retraite qui ne serait plus conditionné par un âge minimal, mais uniquement par le nombre de trimestres cotisés. En clair : si vous avez validé tous vos droits, vous pourriez partir, même avant 64 ans. L’objectif affiché ? Instaurer davantage de justice sociale en tenant compte des réalités de chaque parcours professionnel. Ceux qui ont commencé tôt, travaillé dur ou dans des conditions pénibles pourraient ainsi partir plus tôt, sans être pénalisés par une règle uniforme.
Invitée sur le plateau de franceinfo le mardi 10 juin, la secrétaire générale de la CFDT, Marylise Léon, s’est exprimée sur la question sensible de la capitalisation. Selon elle, ce n’est pas un sujet à écarter d’emblée. « On a toujours dit que la capitalisation, ce n’est pas un tabou. Je suis convaincue, et mon organisation aussi, que c’est avant tout un enjeu d’épargne, et surtout d’accès à l’épargne pour toutes et tous », a-t-elle ainsi affirmé.
Elle souligne que, dans l’état actuel des choses, seuls certains salariés bénéficient réellement de dispositifs d’épargne retraite, souvent ceux issus des grandes entreprises, appelant à réfléchir à des mécanismes qui garantiraient un accès plus équitable à ces dispositifs pour l’ensemble des actifs.
Les atouts d’une retraite sur mesure
Cette approche « à la carte » a de quoi séduire. Elle introduit une flexibilité bienvenue dans un système souvent perçu comme rigide. Ainsi, chacun pourrait ajuster son départ selon sa situation : envies personnelles, santé, parcours professionnel, usure physique… En outre, elle permettrait une meilleure reconnaissance des carrières longues. Aujourd’hui, de nombreux Français ayant commencé à travailler jeunes se retrouvent contraints d’attendre malgré leurs années de cotisation. Avec ce modèle, ils seraient récompensés plus justement. Enfin, en supprimant l’âge légal, la CFDT espère désamorcer les conflits sociaux récurrents autour des réformes : plus besoin de repousser sans cesse un seuil unique qui ne convient à personne.
Une idée qui n’est pas sans risques
Pour autant, le modèle n’est pas exempt d’interrogations. D’abord sur le plan économique : une plus grande liberté de départ pourrait entraîner une hausse du nombre de pensions versées plus tôt, avec un coût potentiel pour les finances publiques. Les projections devront être solides.
Ensuite, un système individualisé nécessite un accompagnement plus complexe. Comment informer chaque assuré sur ses droits réels ? Comment garantir que les plus vulnérables (notamment ceux aux carrières hachées ou à temps partiel) ne se retrouvent pas désavantagés, faute d’avoir pu accumuler assez de trimestres ? Enfin, reste la question de l’équité entre générations. Si la logique de trimestres prime, ceux qui entrent plus tard sur le marché du travail pourraient devoir travailler plus longtemps que leurs aînés, créant un sentiment d’injustice inversée.
Le COR s’oppose
Dans son dernier rapport, le Conseil d’orientation des retraites (COR) envisage un report progressif de l’âge légal de départ, qui pourrait atteindre 66,5 ans d’ici 2070, afin de répondre à l’aggravation du déficit du système. Sa ligne s’oppose donc directement à l’idée d’un départ dès que les trimestres sont acquis.
Un débat à ouvrir
La proposition de la CFDT a le mérite de remettre sur la table une réflexion de fond : faut-il continuer à imposer un âge légal à tous, ou passer à une logique plus individualisée, plus humaine ? Rien n’est tranché.